Puerto Williams est une ville sympa, d'un peu plus de 2000 habitants, très tranquille, où les touristes ne sont pas très nombreux et viennent surtout pour randonner. Quelques heures pour retirer des pesos chiliens, faire des courses pour une dizaine de jours, déclarer notre départ en randonnée à la police, et nous voilà sur un sentier. Nous avons pour programme de marcher une petite dizaine de jours et de combiner deux itinéraires de randonnée : le Lago Windhond, et les Dientes de Navarino. Partis un peu tard, nous arrivons à la tombée de la nuit au petit lac près duquel nous avons décidé de passer le réveillon de la Saint Sylvestre. Un réveillon très tranquille, dans un cadre exceptionnel. Les jours suivants nous conduiront de cols enneigés en petits lacs, sur un itinéraire très sauvage, mais avec plus de visiteurs que ce à quoi nous nous étions attendus. La météo étant patagonienne, il a fallu faire avec les nombreuses averses, le soleil discret et les températures fraiches. Nous avons donc rapidement décidé que nous n'avions pas très envie de commencer ce début d'année à marcher des journées entières sous la pluie, et que nous préférions, une fois n'est pas coutume, raccourcir l'itinéraire et passer quelques demi-journées sous la tente lorsqu'il pleuvait trop. Vieillit-on ou devient-on plus sages ? Malgré le temps mitigé, cet itinéraire est magnifique, et les paysages sont grandioses, avec notamment de belles vues sur la Cap Horn, situé quelques kilomètres plus au sud.
Pour quitter Puerto Williams, nous avons emprunté un ferry, qui pendant une trentaine d'heures remonte le canal de Beagle puis les fjords de Patagonie vers le nord, jusqu'à Punta Arenas. Albatros, dauphins et glaciers étaient au rendez-vous et nous en avons, encore une fois, pris plein les yeux. La Patagonie est une région qui a beaucoup de caractère, sauvage et brute.
Au camping de Punta Arenas, nous avons rapidement entendu parler d'une autre randonnée, conduisant au Cabo Froward, le point le plus au sud du continent américain (encore plus au sud, ce sont des îles, qui composent la Terre de feu). On peut se rendre au point de départ en stop, il y a des rivières à traverser, l'itinéraire est sauvage et peu fréquenté, on peut y voir pas mal d'animaux, c'est long et pas très facile... mais... c'est pour nous ! Pendant trois jours, nous marchons sur ces plages du bout du monde, attendons la marée basse pour traverser les rivières près de leur embouchure, pataugeons dans les tourbières, nous régalons de ces paysages incroyables... Nous y sommes tellement bien que nous passons une journée de repos dans la forêt, en bord de plage, à faire du feu, du pain, et bricoler un réchaud à bois dans une boîte de conserve.
Nous avons ensuite pris le chemin de la France, à regret. En survolant les Andes, c'est les larmes au yeux que j'ai dit au revoir aux Andes.
Marion
Des plumes et des poils : 330 albatros sourcils noirs (oui oui, jb les a comptés un à un...), un renard chapardeur que nous n'avons pas vu, mais dont la réputation nous a contraint à suspendre chaque nuit toute notre nourriture aux alentours du Cabo Froward.
La surprise du chef : du bateau stop ! Sur la plage la plus au sud du continent, au Cabo Froward, nous soupirons en pensant au 50 longs kilomètres que nous avons parcourus à l'aller, et qu'il nous faut refaire au retour... Ce que j'adore en randonnée, ce sont les itinéraires linéaires ou les boucles, mais les aller-retour, je ne suis pas fan... Tuuuuut tuuuuuut ! Un bateau de pêcheur remontant le long de la côte vers le nord nous klaxonne. Nous lui faisons rapidement signe que nous sommes intéressés par le trajet, et n'avons que le temps d'enfiler nos chaussures mouillées et de retrousser nos pantalons avant qu'un pêcheur mette une minuscule annexe à l'eau et vienne nous chercher. S'ensuivent plusieurs heures de navigation au milieu des dauphins avec trois pêcheurs d'une vingtaine d'années. Ils reviennent d'une quinzaine de jours en mer, pendant lesquels ils ont ramassé une dizaine de tonnes d'algues. Le capitaine du bateau fait ce métier depuis l'âge de 15 ans... Dans une eau à 7°C, il plonge à une quinzaine de mètres de profondeur plus de 8 heures par jour, sans ordinateur de plongée. De retour sur la terre ferme, ils ne se reposeront que deux jours avant de repartir. Des conditions de travail extrêmement difficiles, qui font relativiser pas mal de choses.
Highlight météo : quasiment pas de pluie pendant plus de dix jours dans la région de Punta Arenas, voilà qui n'est semble-t-il pas habituel mais très agréable !
La leçon de la semaine : nous nous sommes exercés à faire du feu avec du bois mouillés par toutes les conditions, avec un succès... honorable !