Les rues sont emplies d’hommes et de femmes joyeux, les enfants jouent bruyamment. Glaces, vin rouge et hot dogs, éclats de rire et selfies. Nous sommes le 14 juillet, en France. Mon premier 14 juillet en métropole depuis 2011. Notre premier ensemble, à la maison. Paris est magnifique en cette fraîche soirée d’été. Si je devais ne montrer qu’une image de mon pays à un étranger curieux de savoir ce qui est typiquement Français, alors je voudrais lui montrer ça. Toute ma vie, je n’ai pas souvent été fier de mon pays. Depuis Charlie et le Bataclan, je suis fier de faire partie de cette société qui sait faire la fête, qui n’a pas peur de sortir boire et danser dans les rues, jeunes ou vieux, noirs, jaunes ou blancs, voilées, enturbannés ou torse nu. Ca rigole fort, ça picole, ça se chamaille. Je suis ému de me sentir chez moi, de m’y sentir bien. Comme le dit mon copain Florian, l’herbe n’est pas plus verte, ni ici ni ailleurs. Avoir goûté tellement d’ambiances et de climats me fait apprécier les moindres détails de ce qui m’est inconnu mais aussi de ce qui m’est le plus familier. Le voyage s’est brusquement achevé, à un moment où nous étions prêts pour cela. C’est un coup du destin qui a écrit pour nous cette fin que nous peinions à imaginer. Bien des mois ont passé durant lesquels l’angoisse de revenir et la douloureuse perspective de replonger dans une vie « ordinaire » m’ont hanté. Et puis tout a changé. Mon séjour à Chom Thong en novembre, puis notre passage à Taiwan et au Japon m’ont permis d’envisager sereinement ce retour, le hasard l’aura simplement hâté. Marion écrit que notre couple a été mis à rude épreuve. C’est peu de le dire. Il en ressort méconnaissable. Au cours de ce voyage, notre relation a évolué au-delà de ce que j’aurais jamais pu espérer. Cela ne présume bien entendu en rien de l’avenir mais je le regarde avec un optimisme profond, ancré dans une grande confiance en Marion et en moi. En effet, au cours de ce voyage, je n’ai pas appris de nouvelle langue mais j’ai appris à avoir et à faire confiance. Confiance en moi et dans les autres, confiance dans ma capacité à jauger les intentions de la personne en face de moi. Cet apprentissage a des effets incroyablement positifs sur la qualité de nos vies. Ce voyage se voulait une exploration géographique, physique. Il aura été surtout une exploration de l’humain. Il y a quatre ans, une telle phrase dans un récit de voyage m’aurait agacé. Elle m’aurait semblé vide de sens et prétentieuse. Aujourd’hui, elle me semble avec honnêteté correspondre à ce que nous avons vécu. Ce voyage a été une leçon magistrale sur l’être humain. Il n’est ni bon ni mauvais. L’univers entier semble contenu en chacun de nous; la lumière tout comme l’obscurité nous composent. La gentillesse et l’hospitalité dont nous avons été témoins dans l’écrasante majorité des régions traversées nous ont bouleversé. La curiosité et l’envie d’aller vers l’autre et de le connaître nous ont bluffé. De manière générale, l’individu m’a paru magnifique alors que le collectif s’est si souvent montré sous un jour désolant. La déconnexion entre les individus laisse le champ libre à toutes les bêtises, à toutes les violences. Ce monde manque cruellement de lien entre les uns et les autres; entre ceux qui décident et ceux qui subissent, ceux qui produisent et ceux qui achètent, ceux qui possèdent et ceux qui manquent de tout, ceux qui ont peur. Quatre ans après avoir pris la route, j’ai changé mon régime alimentaire, ma manière de consommer. Mon rapport à la religion et au monde est radicalement différent. Ma relation avec Marion me semble briller comme un sou neuf. J’ai même légèrement changé de boulot ! A ceux qui nous demandaient pourquoi diable nous partions, la réponse me semble toujours aussi difficile à formuler, mais tellement évidente dans mon esprit. Jb Après un mois et demi au Japon riche en émotions et en belles rencontres, nous avons, enfin, pris le chemin du retour. Depuis quelques semaines, nous voilà rentrés en France.
Un retour un peu avancé par rapport à la "date limite" que nous nous étions fixée, mais cela nous convient. J'avoue que j'étais de plus en plus fatiguée de voyager. L'enthousiasme du début de voyage diminuait lentement. Quand nous nous posions quelques jours au même endroit, chaque départ devenait de plus en plus difficile. Refaire son sac, affronter toutes les "petites difficultés" du voyage en stop à petit budget... Je n'y prenais plus le même plaisir. Je suis contente d'être rentrée avant que la flamme ne s'éteigne totalement. Quand nous sommes partis en voyage, je ne savais pas du tout comment mon envie de voyager allait évoluer. Je craignais que des contraintes extérieures me poussent à rentrer en France, alors que mon envie de voyager restait grande. C'est ce qui c'était passé au printemps 2015, quand nous avions été contraints de revenir en France. Quatre mois plus tard, nous étions repartis, plus enthousiastes que jamais ! Cette fois-ci, c'est différent. Je sens que le moment est venu de se poser quelques temps. J'ai l'impression d'avoir au cours de ce voyage énormément appris, de m'être ouverte à des courants de pensée que j'aurai jadis rejetés, d'avoir mûri. J'ai maintenant besoin de temps pour assimiler tout ça, pour mettre en pratique ces nouvelles choses. J'ai également envie de tendre la main aux gens autour de moi comme on me l'a si souvent tendue ces dernières années. Envie de mettre la main à la pâte pour essayer que le monde tourne un peu plus rond. De devenir actrice, après avoir passé tant de temps comme spectatrice de sociétés dont je ne faisais pas partie. Envie de cesser de ne faire "que passer". Je ne pensais pas ressentir un jour un signal aussi fort qu'il est temps de rentrer et de passer à autre chose. Aujourd'hui, quand dans les rues de Paris je croise des voyageurs avec un sac à dos, quand je dis au revoir à mon frère partant en trek en Asie Centrale, quand je vois des gens en route pour l'aéroport, je me réjouis pour eux, mais je ne les envie pas. Je suis contente d'être rentrée. Bientôt, j'habiterai quelque part et pourrai dire "je vais chez moi". Je suis si souvent restée désemparée quand les gens me demandaient où c'est, "chez moi". Je répondais parfois Nantes, parfois Paris, parfois la Champagne, parfois même Lyon, sans grande conviction, me lançant dans des abîmes de réflexions pour essayer de déterminer où est ce "chez-moi". ---------- Depuis notre retour, nous redécouvrons avec plaisir notre beau pays. J'ai ressenti beaucoup d'émotions à regarder le feu d'artifice du 14 juillet tiré près de la Tour Eiffel, un symbole fort. Mon regard sur ce qui m'entoure a changé. Je m'émerveille devant nos campagnes, savoure mes douches quotidiennes, déguste de bons légumes à profusion, suis émue d'acheter un carnet de timbre et de discuter avec le postier... D'ici quelques semaines nous deviendrons toulousains. Jb y reprendra le travail fin août. Nous avons beaucoup de projets à mûrir, de nouvelles pistes de réflexions à creuser. Notre vie sera sans doute très différente de ce qu'elle était avant de partir en voyage. Je suis très enthousiaste à cette idée ! ---------- En août 2013, nous étions partis pour un voyage de 2 ans. Nous aurons finalement passé 3 ans et demi sur les routes du monde. Il y a eu des moments difficiles, des larmes, des cris, des moments où j'ai eu trop faim, trop froid, où j'étais trop fatiguée, où l'incompréhension était trop forte. Il y a eu d'innombrables moments magiques, d'émerveillement, de surprise, des paysages inoubliables, de magnifiques moments de vie dont je me suis sentie une témoin privilégiée. Mais la chose la plus fortes que je garde aujourd'hui en mémoire, c'est l'incroyable gentillesse des gens que nous avons rencontrés. Quel que soit le pays, la culture, la religion, le niveau social, j'ai été impressionnée par l'esprit de fraternité des gens qui ont croisé notre route. Des sourires, de l'entraide, des petits mots gentils, des cadeaux... Même quand les visages paraissaient fermés, il suffisait de sourire, de faire un pas vers eux, et la glace était brisée. C'est universel et ça marche... même en France ! Les mauvaises rencontres ont vraiment été rares. On nous demande souvent de raconter les mauvaises rencontres que l'on a fait. Même en se creusant la tête, on a assez peu d'anecdotes à fournir ! Par contre si vous nous demandez de décrire des belles rencontres, des exemples de générosités, là vous ne nous arrêterez plus... Ce voyage a également mis à l'épreuve notre couple. Nous en ressortons plus forts, riches de ces mille souvenirs contrastés, des épreuves surmontées à deux, et de tous les nouveaux projets que nous avons ensemble. ---------- Merci de nous avoir suivi, merci pour vos commentaires ou messages reçus par mail, qui nous ont aidé à ne pas perdre le contact avec la France. Nous posterons encore quelques messages sur ce blog, pour dresser quelques bilans concernant notre voyage et le retour. Et puis il tombera en hibernation... jusqu'au prochain voyage, peut-être ? Marion En mars 2015, j'avais écrit un premier billet traitant des livres de voyages lus au cours de notre voyage. Voici la suite de ce post, avec quelques livres lus au cours des deux dernières années et qui m'ont particulièrement marqués.
------- Livres de voyage
-------- Livres de voyage intérieur
------ J'ai lu une partie de ces livres en version électronique, et une partie en version papier, que j'ai récupéré puis laissé dans des guest houses. N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé si vous avez lu certains d'entre eux ! Bonne lecture ! Marion |
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July 2017
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